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Luda (8/03/1913, Berlin - 2002) France
Luda Schnitzer, née Ludmilla Makowsky.
D'origine russe mais née à Berlin, Luda arrive en France en 1925. Elle est sculpteur puis journaliste, pigiste, et romancière pour la jeunesse (elle travaille plusieurs années pour les éditions Vaillant), traductrice du russe. Elle écrit également avec son époux Jean Schnitzer sur le cinéma russe et n'a cessé de s'intéresser à la structure des contes qu'elle a souvent adaptés ou écrits et pour lesquels elle a consacré une étude "Ce que disent les contes" (Le Sorbier, 1981).
Commençons par le morceau d'importance : La Hache de Pierre, par Luda.
Il s'agit d'un roman transtemporel (j'ai lu ce terme dans les éditions Garry, je réutilise).
Deux jeunes journalistes visitent un musée consacré à la préhistoire dont le gardien et guide est particulièrement étrange. Cet homme simple fait preuve d'une connaissance intime de cette période mal connue.
Et pour cause, l'homme malade de solitude va finalement leur raconter son étonnante histoire dans la terrible Cité, à cheval entre l'Âge de Pierre et l'Âge de Bronze, dont il a libéré les esclaves d'un maître redoutable. Ce tyran, à l'apogée des hommes de Pierre, maintenait toute la population sous son emprise grâce à une hache réputée magique. C'est à la suite d'une rébellion difficile que le héros réussit à vaincre la superstition des habitants mais dans un ultime round, alors qu'il détenait enfin la hache maudite, un simple hache en silex sans magie, il roula avec elle dans un trou temporel, un accident physique de notre trame, et se retrouva au 20e siècle.
Recueilli et soigné de ses blessures par les savants qui fouillaient les vestiges préhistoriques de la région, il eut l'idée de les conduire à une cache d'armes soigneusement cachée des milliers d'années avant. Cela et ses connaissances surprenantes sur l'époque lui permirent d'obtenir cette modeste place dans le musée conservant les reliques de la Cité tant haïe...
Ce roman n'a jamais été publié en volume et pourtant, il ne manque pas d'intérêt. L'auteur bluffe son lecteur par des arguments fantastiques (la hache magique, la survivance fantastique) pour finir par donner une explication rationnelle quoique carrément conjecturale (la hache n'a que le pouvoir de la superstition mais une singularité physique a projeté l'homme au XXe siècle).
La Hache de Pierre, par Luda, pas d'illustration
in Vaillant n° 811-822 (27/11/1960 au 12/02/1961)
Du même auteur, dans le numéro 822, le lecteur peut découvrir une courte nouvelle humoristique :
Le Maître de la terreur et le monstre, par Luda, illustration de Tabary
in Vaillant n° 822 (12/02/1961)
Un récit au second degré plutôt amusant dans sa première partie puisqu'elle met en scène un écrivain de SF à succès créateur d'un héros insupportablement vindicatif dans ses explorations. L'auteur reçoit la visite d'un homme insignifiant qui lui propose une machine sensorielle à créer les histoires. En panne d'idées, l'écrivain accueille avec enthousiasme ce produit de la très haute technologie improbable et l'essaye immédiatement. La fin joue entre le second et le troisième degré puisque la machine transforme le Maître de la Terreur en gentil auteur pour la jeunesse et son Sam Jones en bêlant admirateur des jolis bébés extraterrestres "si mauves et vert tendre"...
En voici quelques extraits qui dénotent d'une connaissance certaine de l'anticipation contemporaine :
Le Maître de la Terreur soupira et traça le titre de son nouveau roman d'épouvante : «Trépas sur Véga» Une étoile, Véga, pas une planète. Mais s'il fallait s'arrêter à ces détail... Le Maître de la Terreur soupira encore et se mit à l'ouvrage.
« ... — Nous voici arrivés à bon port! déclara Sam Jones en bouclant son scaphandre.
— Vous êtes sûr que ce sera un "bon" port ? demanda son second. Et Sam Jones répondit par un franc éclat de rire.
— Je l'espère... pour les habitants ! dit-il jovialement en attachant son fusil désintégrateur et en prenant un pistolet atomique dans chaque main.»
Le Maître de la Terreur frissonna. Sam Jones, son héros habituel, l'horripilait. Depuis six romans déjà, le Maître de la Terreur essayait vainement de trucider cet être obtus et brutal qu'une chance invraisemblable (et le désir formel de l'éditeur) tirait chaque fois des situations les plus désespérées. Mais, aujourd'hui, le Maître de la Terreur était décidé à mettre fin à la carrière de Sam Jones Et, pour commencer, il allait désarmer cet énergumène. Comment ?.. Eh bien! sur Véga, l'atome n'est pas fissible. Il reste stable, l'atome. Alors, tes armes, mon gaillard, ça ne marche plus ! Excellente idée.
Au moment précis où Sam Jones posait le pied sur l'astre appelé à devenir son tombeau, une sonnerie stridente retentit. Le Maître de la Terreur posa son stylo et alla ouvrir.
Sur le palier se tenait un petit homme quelconque, du type 'signes particuliers : néant". Il salua très respectueusement
— C'est au Maître de la Terreur que j'ai l'honneur de parler ?
— Heu... peut-être... Je veux dire ça dépend ! Que désirez-vous ? bafouilla le Maître de la Terreur qui redoutait les représentants de commerce.
— Ce que je désire ? Vous dire mon admiration, cher Maître ! Et puis... Mais entrons, voulez-vous ? C'est assez confidentiel.[...]
— Cher Maître, l'association que je représente vous a choisi entre tous le» auteurs de romans d'anticipation pour expérimenter une invention sensationnelle, un appareil indispensable ï l'écrivain moderne. Plus de stylo, plus de machine à écrire, plus de dictaphone, plus rien ! Le magnétorama enregistre directement votre pensée et la projette devant vous en scope. en couleurs et en relief. Son stéréophonique variateur thermique et diffuseur d'odeurs. Votre pensée comme si vous y étiez!
[...]
... Tout de même, il fallait essayer l'appareil. La prise branchée et le casque sur la tête, le Maître de la Terreur tira vers lui son manuscrit commencé. Où en était-il, déjà ? Ah! oui, il venait de débarquer sur Véga. Parfait. Enchaînons . (1)
«..., Le paysage qui s'offrait aux regards de Sam jones était l'image même de la désolation. Un morne désert s'étendait à l'infini. S'enfonçant à chaque pas dans le sable, le hardi explorateur se mit en marche vers l'horizon inhospitalier. »
Le Maître de la Terreur poussa un petit cri : ses pieds venaient de s'enfoncer dans le sable chaud Rien d'étonnant à cela, puisqu'il se trouvait dans un désert. Oui, lui, le Maître de la Terreur en personne et en scaphandre spatial ! Ce magnétorama était une invention formidable et ce M. Dupont un homme génial !(1) Les familiers de "Science-Fiction" reconnaîtront certaines phrases du roman qui va suivre. Le Maître de la Terreur prend son style où il le trouve. De préférence chez ses confrères.
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