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Tjs dans les grands thèmes SF, un premier grand texte sur le thème de la race qui nous supplantera.
Bulwer-Lytton (Sir Edward-George) auteur anglais (1803 - 1873)
*La race future (Dentu, éd.) - 1888.
*rééd. sous le titre "La Race qui nous exterminera" (Ed. de la Revue Demain) - 1935.
Dernière modification par Belzébuth (21-01-2006 19:27:09)
Le danger de devenir idiots n'est pas de nature à effrayer les hommes, car, à tout prendre, ça ne les changera pas beaucoup. Jacques Spitz
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Salut,
Tjs dans les grands thèmes SF, un premier grand texte sur le thème de la race qui nous supplantera.
Bulwer-Lytton (Sir Adward-George) auteur anglais (1803 - 1873)
*La race future (Dentu, éd.) - 1888.
*rééd. sous le titre "La Race qui nous exterminera" (Ed. de la Revue Demain) - 1935.
Est-ce qu'il s'agit aussi du même texte publié sous le titre _Race à venir (la)_ ? Concernant ce roman j'avais noté 1871 comme année de première publication... est-ce exact ?
AB+ Laurent
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Lecture en cours : Souvenir - Philip K. Dick
La Marche funèbre des Marionnettes Adam-Troy CASTRO
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Oui, il en existe plusieurs éditions françaises
La 7e édition (ou tirage) anglaise à la BNF :
Lytton, Edward Bulwer (1803-1873 ; baron)
The Coming race (by E. Bulwer-Lytton). 7th edition [Texte imprimé]. - Edinburgh : W. Blackwood and soons, 1873. - In-16, 280 p..
Sur une colline de Scandinavie, par un beau soir de l'an 2082, un homme marchait d'un pas rapide. Un vent léger soulevait son immense cape noire et agitait mollement ses longs cheveux d'un blanc soyeux. Cet étrange personnage était Warner Ohberg, un prestigieux savant dont le génie paraissait bien proche de la folie (L. Massiéra, Le voleur d'océans, 1955, Mon roman d'aventures 346)
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Une édition annotée récente :
Lytton, Edward Bulwer (1803-1873 ; baron)
The coming race [Texte imprimé] / Edward Bulwer-Lytton ; ed. with an introd. by David Seed. - Middletown (Conn.) : Wesleyan university press, 2005. - LIII-218 p. : front. ; 22 cm. - (The Wesleyan early classics of science-fiction series).
Contient une biographie de l'auteur et une importante partie critique. - Bibliogr. p. 187-207
ISBN 0-8195-6749-3 (rel.)
Sur une colline de Scandinavie, par un beau soir de l'an 2082, un homme marchait d'un pas rapide. Un vent léger soulevait son immense cape noire et agitait mollement ses longs cheveux d'un blanc soyeux. Cet étrange personnage était Warner Ohberg, un prestigieux savant dont le génie paraissait bien proche de la folie (L. Massiéra, Le voleur d'océans, 1955, Mon roman d'aventures 346)
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Je n'avais pas remarqué que l'édition Dentu avait une préface :
Lytton, Edward Bulwer (1803-1873 ; baron)
La race future [Texte imprimé] / Edward Bulwer,... ; préf. par Raoul Frary. - Paris : E. Dentu, 1888. - XII-313 p. ; in-18.
Frary, Raoul (1842-1892 ). Préfacier
Cette édition est disponible sur Gallica :
Poste d'accès aux ressources électroniques
NUMM- 62831 support : texte numérisé
Sur une colline de Scandinavie, par un beau soir de l'an 2082, un homme marchait d'un pas rapide. Un vent léger soulevait son immense cape noire et agitait mollement ses longs cheveux d'un blanc soyeux. Cet étrange personnage était Warner Ohberg, un prestigieux savant dont le génie paraissait bien proche de la folie (L. Massiéra, Le voleur d'océans, 1955, Mon roman d'aventures 346)
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La notice de la Bibliothèque royale de Bruxelles :
Titre : La race qui nous exterminera / Sir Edward Bulwer-Lytton; Traduit de l'anglais par Gustave Lambert Brahy
Auteur(s) : Sir Edward Bulwer-Lytton
Gustave Lambert Brahy
Editeur(s) : Paris ; Brux : Editions de la revue " Demain ", 1944
Collation : 228 p : couv ; 12°
Cote de l'ouvrage : B 2538b 7 (Magasin - Salle de lecture générale)
Sur une colline de Scandinavie, par un beau soir de l'an 2082, un homme marchait d'un pas rapide. Un vent léger soulevait son immense cape noire et agitait mollement ses longs cheveux d'un blanc soyeux. Cet étrange personnage était Warner Ohberg, un prestigieux savant dont le génie paraissait bien proche de la folie (L. Massiéra, Le voleur d'océans, 1955, Mon roman d'aventures 346)
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Et les deux rééditions récentes bien connues :
Lytton, Edward Bulwer (1803-1873 ; baron)
La Race à venir... [Texte imprimé] : roman / Edward Bulwer Lytton ; traduit de l'anglais par Honoré Destouches ; préface de Jacques Bergier. - Verviers : Gérard ; Paris : diffusion Inter-forum, 1973 (impr. en Belgique). - 247 p. : couv. ill. en coul. ; 18 cm. - (Bibliothèque Marabout ; 438. Science-fiction).
. - Trad. de : The Coming race
Lytton, Edward Bulwer (1803-1873 ; baron)
La Race à venir [Texte imprimé] : roman / Edward Bulwer-Lytton ; trad. de l'anglais par Honoré Destouches ; préf. par Jacques Bergier. - Paris : Néo, 1987 (18-Saint-Amand : Impr. Bussière). - 247 p. : couv. ill. en coul. ; 21 cm. - (Fantastique, science-fiction, aventure, ISSN 0244-5522 ; 194).
. - Trad. de : The Coming race
ISBN 2-7304-0446-5
Sur une colline de Scandinavie, par un beau soir de l'an 2082, un homme marchait d'un pas rapide. Un vent léger soulevait son immense cape noire et agitait mollement ses longs cheveux d'un blanc soyeux. Cet étrange personnage était Warner Ohberg, un prestigieux savant dont le génie paraissait bien proche de la folie (L. Massiéra, Le voleur d'océans, 1955, Mon roman d'aventures 346)
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Des surhommes artificiels se trouvent ici (voir topic sur Falcoz) :
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« Petit » article de Adolphe BRISSON datant du 8 avril 1888 et paru dans le numéro 250 des « ANNALES POLITIQUES ET LITTERAIRES » et se rapportant à « LA RACE FUTURE » de Edward BULWER, Lord LYTTON.
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LIVRES ET REVUE.
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« LA RACE FUTURE ».
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Est-ce un roman que nous avons sous les yeux? Est-ce une vision de la société future ? Qui peut le dire ? Fiction ou réalité, ce livre est fort curieux, il mérite le vif succès qui l’a accueilli en Angleterre, et qui pourrait bien le suivre chez nous.
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I.
Peut-être avez-vous lu un récit de Jules VERNE intitulé : « Au centre de la Terre ». Jules Verne y raconte l’aventure d’un savant qui, descendu dans le cratère d’un volcan éteint, y découvre une fissure, suit cette voie qui s’ouvre devant lui, et pénètre ainsi au centre du globe. Il y rencontre des monstres horribles, une végétation inconnue et une mer intérieure, peuplée d’animaux antédiluviens ; il y court des dangers terribles, et finit, après mille péripéties, par être rendu à la lumière du jour.
Le héros de Lord Lytton accomplit à peu près le même voyage. Il s’enfonce dans un puits de mine. Un éboulement se produit, et lui ouvre une route vers des régions inconnues. L’audacieux s’y engage, attiré par une lueur qui brille dans le lointain. Il arrive, non pas dans une contrée déserte et peuplée de monstres, comme le voyageur de Jules Verne, mais dans un pays délicieux, couvert de monuments magnifiques, habité par une race savante, merveilleusement policée, de mœurs douces et hospitalières. Il est reçu avec cordialité, il étudie les usages de ce peuple extraordinairement civilisé, qui ne vit que pour la science et par la science, qui ne connaît aucun de nos fléaux, ni la guerre, ni la politique, ni la lutte des classes, ni l’ambition, qui jouit enfin , au sein de l’abondance, de la plus parfaite félicité.
Cette peinture idéale est simplement une allégorie. Dans la pensée de Lord Lytton, la race humaine est indéfiniment perfectible. Il croit qu’elle s’éloigne chaque jour de la barbarie et que, dans quelques siècles, par la marche du progrès, par le développement des sciences, elle arrivera au bonheur suprême. Le peuple qu’il décrit dans son livre, et qu’il place au centre du globe, est l’image de ce que sera notre société dans quelque mille ans, lorsqu’elle aura acquis son complet développement. La ville idéale qu’il nous montre se nommera un jour Paris, Londres ou New-York, la race qu’il appelle du nom de « Vrill-Ya », ce sera la race française, ou la race américaine, ou plutôt la race anglaise, -car Lord Lytton est anglais et manifeste, comme en général ses compatriotes, un vif amour-propre national.
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II.
Admettons sa fiction ingénieuse, supposons que notre Europe, si cruellement déchirée, hélas ! arrive à cet idéal de repos et de bonheur, et examinons les mœurs de ce peuple « Vrill-Ya », que Lord Lytton nous donne comme une séduisante image de l’avenir.
Pénétrons avec lui, ou plutôt avec son héros, dans les entrailles du globe ; laissons-nous tomber dans l’immense grotte qui sert de patrie au peuple Vrill-Ya, et jetons les regards autour de nous. Parcourons cette plage, où étincelle un sable d’or. Un bâtiment d’une construction sévère se dresse à nos yeux, un être animé en franchit le seuil, c’est un spécimen du peuple inconnu :
Etait-ce bien un être humain ? Debout sur la grande route, il regarda autour de lui, me vit et s’approcha. Il vint à quelques mètres de moi ; sa vue, sa présence, me remplirent d’une terreur et d’un respect indescriptible, et me clouèrent au sol. Son principal vêtement me parut consister en deux grandes ailes, croisées sur la poitrine et tombant jusqu’aux genoux ; le reste de son costume se composait d’une tunique et d’un pantalon d’une étoffe fibreuse. Il portait sur la tête une sorte de tiare, parée de pierres précieuses, et tenait à la main droite une mince baguette d’un métal brillant, comme de l’acier poli.
Cet homme fait un signe ; l’Européen est saisi, garrotté, emporté dans le palais ; de nouvelles surprises l’y attendent. Ce palais luxueusement meublé est une merveille de mécanique ; tout ce qu’il contient semble mû par une force inconnue ; les domestiques sont remplacés par des automates ; les objets nécessaires à la vie apparaissent, disparaissent sur un geste de la main. L’étranger croit sa dernière heure venue. On ne lui fait aucun mal. On le plonge dans un sommeil magnétique. Quand il se réveille, il peut converser avec ses hôtes. Pendant son sommeil, on lui a suggéré la parfaite connaissance de leur langue. Il leur conte son histoire ; il leur décrit les peuples qui habitent sur la Terre ; il leur vante leur civilisation. Ses auditeurs sourient. Pauvre civilisation comparée à celle dont ils jouissent ! Et ils l’initient complaisamment aux merveilles qui l’entourent. L’Européen est stupéfait. Au point de vue du luxe matériel de la vie, les Vrill-Ya les plus pauvres éclipsent les Rothschild et les Vanderbilt de notre vieux monde. Leurs palais sont incomparables. Chaque appartement est un chef-d’œuvre de bon goût et de confort. Partout des oiseaux, partout des fleurs.
On avait appris à tous ces oiseaux à chanter des airs réguliers, et ils dépassaient de beaucoup nos bouvreuils savants, qui ne peuvent guère aller au-delà de deux morceaux et ne peuvent pas, je crois, chanter en partie. On aurait pu se croire à l’Opéra quand on écoutait les concerts de cette volière. C’étaient des duos, des trios, des quatuors et des chœurs, tous notés et arrangés comme dans nos morceaux de musique. Si je voulais faire taire les oiseaux, je n’avais qu’à tirer un rideau sur la volière, et leur chant cessait dès qu’ils se trouvaient dans l’obscurité. Une autre ouverture servait de fenêtre, sans vitre, mais si l’on touchait un ressort, un volet s’élevait du plancher ; il était formé d’une substance moins transparente que le verre, assez cependant pour laisser passer le regard. A cette fenêtre était attaché un balcon, ou plutôt un jardin suspendu, où se trouvaient des plantes gracieuses et des fleurs brillantes.
Enfin, tous les citoyens et toutes les citoyennes possèdent en eux un fluide spécial, qu’ils nomment le Vril, et dont la puissance est infinie. Quel est ce fluide ? On ne sait, mais on sait du moins quelle est sa vertu. Grâce à lui les Vrill-Ya, peuvent se communiquer leurs pensées, sans parler, à des distances immenses. Emmagasiné à haute pression, ce fluide agit comme la foudre, et détruit tout ce qu’il touche. Emmagasiné à pression plus faible, ses effets sont bienfaisant : il magnétise, il endort, il guérit, il ouvre la mémoire et facilite les travaux de l’esprit. Chaque individu à donc en lui une puissance effroyable dont il peut instantanément se servir. Et comme s’il l’employait contre ses semblables, les représailles seraient terribles, il ne s’en sert que contre les animaux féroces qui menacent son repos. La guerre, la lutte à main armée n’existent plus chez ce peuple bienheureux.
Mais la politique surtout fut transformée par la découverte de la terrible puissance du Vril et de ses moyens de l’employer. Dès que les effets se firent mieux connus et plus habilement mis en œuvre, toute guerre cessa entre les peuples qui avaient découvert le Vril, car ils avaient porté l’art de la destruction à un degré de perfection qui annulait toute supériorité de nombre, de discipline et de talent militaire.
Si deux armées en venaient aux mains possédant le secret de ce fluide terrible, elles devaient s’anéantir réciproquement. L’âge de la guerre était donc fini, et quand la guerre eut disparu, une révolution non moins profonde ne tarda pas à se produire dans les relations sociales. L’homme se trouva si complètement à la merci de l’homme, chacun d’eux pouvant en un instant tuer son adversaire que toute idée de gouvernement par la force disparut peu à peu du système politique et de la loi.
Quelle félicité ! Pas de guerre ! Pas de luttes ! Le sol est partagé entre tous les citoyens, la cité est gouvernée par un magistrat unique. Et nul ne convoite cette charge suprême car aucun honneur n’y est attaché. Ce gouverneur est un homme comme les autres, ni plus riche, ni plus pauvre. Les spéculations sont bannies, le jeu inconnu. L’amour même est un sentiment calme, ce n’est plus une passion. Par suite, la littérature, qui n’est que la peinture des passions, s’est éteinte. On relit les anciens livres, on n’en fait plus de nouveaux.
Les Vril-ya n’ont pas toujours goûté cette paix parfaite. Ils ont connus les révolutions, ils ont passé par la période du « Koom-Posch », c'est-à-dire par la royauté, puis par celle du « Gleck-Nas », c’est-à-dire la révolution et l’anarchie ; mais ces époques hideuses ont disparu, et aujourd’hui ce peuple supérieur aux passions, délivré des orages, recueilli dans son bonheur, jouit d’une vie toute matérielle, mais opulente et tranquille.
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III.
L’allusion est transparente. La prédiction est-elle attrayante ? Devons-nous désirer que les vœux de Lord Lytton s’accomplissent ? L’Europe entière vit en ce moment sous le règne du Koom-Posch ; la France, hélas ! à fait un pas de plus, elle glisse dans le Gleck-Nas, dans l’anarchie et le désordre. Pouvons-nous espérer qu’à tant de luttes succède un jour le calme parfait ? Devront-nous le désirer ? Et si nous supposons que le rêve de l’auteur se réalise, ce rêve est-il vraiment un beau rêve ?
Lord Lytton a écrit son Utopie, comme tant d’autres, comme Thomas Morus, comme Fénelon, comme Fourrier. Il n’a pas échappé aux pièges où sont tombés ses ancêtres et comme le dit fort bien M. Frary : L. Lytton n’accomplit qu’une moitié de sa tâche. Il nous a donné l’idée d’une humanité parfaitement sage, mais non d’une humanité parfaitement heureuse.
Les « Vrii-Ya » ont peu de besoins, ils n’accomplissent nul effort. L’outillage de l’industrie est si parfait, que les machines seules travaillent ; les hommes se croisent les bras. Ils n’ont pas de luttes à soutenir, de dangers à éviter. Ils se promènent, ils causent, ils se réunissent dans des festins, où règne la sobriété. Leurs appétits sont calmes, ainsi que leurs amours. Comme ils doivent s’ennuyer ! Qu’ils doivent trouver la vie monotone et plate ! Ils n’ont ni les émotions de la guerre, ni les plaisirs de la chasse. La douceur de leur nature répugne au carnage. Ils ne connaissent même pas les joies littéraires ; ils relisent les auteurs anciens pour y trouver la peinture des passions dont ils sont exempts, des conflits qui ne sont plus de leur siècle. Leur âme est toujours tranquille, leur visage toujours calme ; ce sont des hommes de marbre. Ils ne souffrent pas, ils ne vivent pas, ils ne sont pas réellement et humainement heureux.
Oui, M. Frary a raison de le proclamer dans sa préface, le bonheur suppose l’effort et la lutte.. Or, il n’est pas d’effort sans obstacle, de lutte sans adversaire. Ce n’est pas la vraie félicité que celle qu’on n’a pas conquise, que la félicité sans combat, sans risque, que la félicité qui s’endort dans un repos éternel ! Celui-là ne vit pas, qui n’a pas souffert, qui n’a pas connu les émotions, les passions, et ces joies ineffables qui succèdent aux épreuves.
Lorsqu’on est fatigué ou découragé, on aspire au repos ; mais à peine l’a-t-on goûté, que l’on regrette la lutte. C’est l’éternelle histoire du marin, qui, dans ses heures d’angoisse, soupire auprès sa chaumière, et qui, dès qu’il est à terre, brûle du désir de s’embarquer ! Le jour enfin, où vieux et las, il renoncera à la mer perfide, c’est avec un soupir de regret qu’il verra s’éloigner la barque qui l’a tant de fois porté ; c’est avec mélancolie qu’il songera aux dangers bravés, aux luttes passées, et ce repos, qu’il a désiré toute sa vie, lui semblera odieux !
Ainsi le veut la loi de notre nature ! Et il est heureux que cette ardeur nous anime car seule elle peut nous imposer les grands desseins et nous donner la force de les accomplir. Je ne sais si l’humanité future ressemblera à celle que nous montre Lord Lytton, si les hommes de demain seront comme il l’espère, dénués d’énergie, dépourvus de passions, rebelles à tout effort. Ces homme-là, si jamais ils existent, vivront calmes, mourront vieux, mais s’ils lisent nos ouvrages, nos romans, nos histoires, s’ils lisent tant d’exploits accomplis par le seul miracle du patriotisme ou de la foi, peut-être ces hommes parfaits porteront-ils envie aux barbares que nous sommes, peut-être regretteront-ils le sort de ces vieux ancêtres qui souffraient, qui luttaient, qui se faisaient tuer sottement, mais qui sentaient, qui croyaient, qui aimaient.
Adolphe BRISSON
(Pour rappel cette critique date de 1888)
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